Interview de Michel DARD par Gilles HERVET
Gilles Hervet : Bonjour Michel, je viens de faire ta connaissance comme partenaire pour les
préliminaires de la 22ème Olympiades. Cela m’a donné l’idée d’en savoir plus sur toi. Peux-tu nous en dire
plus sur toi, sur ton parcours échiquéen ? Notamment, comment es-tu arrivé à l’AJEC ?
Michel Dard : Instituteur de campagne, c’est par l’intermédiaire des chroniques échiquéennes de Jacques
Negro dans le périodique syndical « L’Ecole libératrice » que j’ai appris l’existence de l’AJEC.
Je rejoignais celle-ci en 1973 et la quittais en 1989 pour y revenir, retraité, en 2013.
GH : Cela fait une sacrée coupure. Que de changement tu as dû trouver à ton retour. Si je reviens d’abord
sur ta première carrière. Quels souvenirs gardes tu de cette période, que ce soit des instances de l’AJEC
ou de tes rencontres épistolaires ?
MD : Des instances de l’AJEC, je me souviens avoir proposé à Pierre Couët mes services au sein de notre
association. Très obligeant, il m’en avait dissuadé après m’avoir présenté les servitudes qu’un tel
engagement demandait. Il était inspecteur de l’éducation nationale et je lui avais confié être instituteur et
secrétaire de la mairie de mon village. Sans doute avait-il jugé que la charge aurait été trop lourde.
S’agissant de mes rencontres épistolaires, j’ai avant tout lié une véritable amitié qui existe encore depuis
bientôt cinquante ans. Robert, adversaire de la première heure, avait eu l’extrême gentillesse de me faire
parvenir un cadeau fabuleux : le premier tome paru de l’encyclopédie yougoslave des Échecs. Partant de
là, nos destins étaient liés.
Par ailleurs mais dans le seul cadre de nos parties, j’ai notamment bien échangé avec Maurice Alberny à
propos des montres molles de Dali entre autres. Jean Lennon, avec lequel j’ai eu un très grand plaisir à
correspondre, fameux inventeur du coup de Gibraltar (d3), était un partenaire à l’humour et à l’esprit des
plus affûtés qui soient.
GH : Quelles sont tes principaux faits d’armes sur l’échiquier durant cette période ?
MD : Je n’ai jamais joué autrement que par la voie postale durant toute cette période.
Deux satisfactions plutôt que des faits d’armes, la première étant d’avoir réfuté un coup présenté – à
l’époque – à l’avantage des Blancs dans une défense russe. Ce que j’ignorais et devais apprendre par la
suite.
La seconde – toujours pour l’époque – a été de voir une de mes parties publiée dans le CDE.
GH : Aujourd’hui, comment vois-tu l’évolution du JPC et de notre association ?
MD : S’agissant du JPC et de l’ICCF, je ne nourris pas vraiment d’inquiétude quant à leur pérennité.
Chacun y trouve et y trouvera longtemps son content. Pour ce qui me concerne, le résultat logique de
toute partie d’échecs bien menée doit être le partage du point. Dès l’instant où j’ai eu du plaisir à la jouer
et à apprendre ou bien redécouvrir quelque(s) petites chose(s) oubliées ou pas, je suis comblé.
S’agissant de l’AJEC, je considère qu’elle perdurera tant qu’il existera des hommes et des femmes
désireux de s‘investir pour le bien de tous les ajécistes. Comme pour tout bénévolat, l’association ne
saurait durer sans eux. Concernant les effectifs en diminution constante depuis de nombreuses années,
qu’en dire sinon espérer que ce n’est pas une mortelle fatalité.
GH : Justement, comme tu l’as évoqué plus haut, un tout petit rôle au sein de notre association ne
pourrait-il pas s’envisager dans les mois à venir ? Histoire peut-être aussi d’avoir ce prétexte pour créer
du lien, si tant est que ce soit un but recherché ?
MD : Pourquoi pas, même si la vision que j’ai du bénévolat est celle de personnes taillables et corvéables
à merci auxquelles souvent on n’adresse pas le moindre remerciement sinon des critiques.
Créer du lien ? Bien sûr. Mais avant tout être véritablement utile.
GH : Je te rassure. Ce n’est pas le cas à l’AJEC. Chacun est libre de faire ce qui correspond à ses attentes
et sa disponibilité. Sinon, suis tu l’actualité du jeu sur l’échiquier ? Joues tu encore sur l’échiquier du
reste dans un club par exemple ou ne serait-ce rien que pour faire des parties amicales ?
MD : Oui, bien sûr ! Je suis l’actualité échiquéenne depuis l’an1982 via essentiellement le magazine
Europe Échecs, puis depuis quelques années, au travers de son remarquable site Internet. Je suis resté
abonné à la revue tout ce temps par pur « patriotisme échiquéen français » : c’était ma façon de soutenir ce
mensuel qui participe – en plus de la qualité de ses chroniqueurs – du développement de notre si belle
langue. Pareillement, je suis longtemps resté abonné au Courrier des Échecs pour la même raison.
Pour ce qui est de jouer aux Échecs autrement que par correspondance, il n’en est rien. Je reste attaché à
cette forme de jeu pour la toute bonne raison que je n’ai connu qu’elle, qu’elle satisfait pleinement ma
quête de sens et par-delà ce qu’il y a derrière toute forme d’apparence.
J’ai cependant également joué un temps sur la Toile avec de bons résultats jusqu’à ce qu’un jour la souris
de mon ordinateur bafouille à cause autant du stress que d’une méchante main qui n’obéissait plus très
bien à mes injonctions.
GH : Je ne sais pas si tu aimes voyager et te déplaces facilement. Mais pourquoi ne pas venir lors d’une
prochaine AG ? (la prochaine est à Marseille du reste)
MD : Ah ! Marseille, la ville de mon vieil ami, Robert. C’est bien volontiers et avec grand plaisir que je la
hanterai de nouveau si tant est que cette AG ne se déroule pas au cours d’une de mes missions en tant que
collaborateur occasionnel de l’État.
GH : Michel, c’était un plaisir de faire ta connaissance. Pour conclure, aurais-tu une petite partie
personnelle qui t’a laissé un bon souvenir ?
MD : Le plaisir aura été partagé, Gilles. Si le moi est haïssable, selon la formule de Pascal, il faut
convenir que tu pratiques un art certain de la maïeutique : je déteste me mettre en avant et pour le coup, tu
as su forcer mes retranchements naturels. Tu es très fort !
Un bon souvenir est cette partie disputée sur un site par correspondance autre que celui de l’ICCF. J’y
affrontais un adversaire d’une courtoisie irréprochable, aujourd’hui paré du titre de SIM au sein de notre
fédération. J’ignore ce qu’elle vaut à l’aune des analyses logicielles actuelles. Jouée en 2009, nul doute
qu’elle fourmille d’imprécisions. Toutefois, elle m’est restée en mémoire pour avoir tenu en défense de
belle façon, Marius ne parvenant pas alors à percer quand je ne jouais – de mémoire – que sur trois ou
quatre cases seulement.
Broniek,Mariusz Maciej – Dard,Michel [B12] – LSS, 14.02.2009
1.e4 c6 2.d4 d5 3.e5 Ff5 4.Cf3 e6 5.Fe2 Cd7 6.0–0 Ce7 7.Ch4 c5 8.c3 Fe4 9.Cd2 Cc6 10.Cxe4 dxe4 11.g3
cxd4 12.cxd4 Fe7 13.Cg2 0–0 14.Fe3 Cb6 15.Tc1 Tc8 16.Cf4 Fg5 17.Ch3 Fe7 18.Fb5 Dd5 19.Fxc6 Txc6
20.Txc6 bxc6 21.Db1 Db5 22.b3 Cd5 23.Tc1 Fa3 24.Tc4 Cb6 25.Tc2 h6 26.Cf4 Cd5 27.Df1 Td8 28.Dxb5
cxb5 29.Cxd5 Txd5 30.g4 a5 31.Rg2 Fe7 32.Tc6 Rf8 33.Ta6 Fd8 34.Rg3 g5 35.f3 exf3 36.Rxf3 Re7
37.Re4 Rd7 38.a4 b4 39.Ta8 Rc6 40.Tc8+ Rd7 41.Tc1 Fe7 42.Ff2 Fd8 43.Tc2 Fe7 44.h3 Fd8 45.Tc4 Fe7
46.Tc1 Fd8 47.Fg1 Fe7 48.Fe3 Fd8 49.Tc2 Fe7 50.Tf2 Re8 51.Tf1 Fd8 52.Fg1 Fe7 53.Te1 Fd8 54.Fe3
Fe7 55.Tc1 Rd7 56.Th1 Fd8 57.Ff2 Re8 58.Te1 Td7 59.Fe3 1⁄2–1⁄2